Pirate, adresse mythique et discrète, accrochée aux rochers et surplombant la mer du côté du Cap Martin; cette cabane de pêcheur a été longtemps un repère enjoué de la jet-set et des stars des années 60-70, entre robes du soir et maillots de bain, talons hauts et nu-pieds. Ces Princesses ou Comtesses, ces héros ou séducteurs d’un jour ou de toujours se nommaient Gina Lollobrigida, Brigitte Bardot, Franck Sinatra ou Roger Moore… Ce lieu inventé a été créé et construit de toute pièce par la main d’un ancien croupier du casino de Menton : Robert Viale. Véritable entrepreneur au teint buriné, à la clinquante boucle d’oreille et au caractère bien trempé, il a été surnommé le Pirate par ses amis et clients. Très vite, le restaurant devient une référence pour son emplacement unique, sa cuisine fraîche et simple et fait déplacer monégasques et gens de la région. C’est la rencontre avec le directeur artistique de la très chic et dynamique Société des Bains de Mer qui va accélérer le succès en invitant les artistes qui se produisent en Principauté; tout commence avec Harry Bellafonte, puis se succèderont des années durant : le Prince Charles, La Callas, Onassis, Lauren Bacall sans oublier Alain Delon, Jacques Chirac et Joséphine Baker… Tous viennent pour l’ambiance festive, décalée et délicieusement orchestrée par Le Pirate, le plus célèbre de la planète Show-Biz : on danse sur les tables, on casse les assiettes et les verres au rythme des musiciens, les langoustes se pêchent théâtralement dans la mer ou plutôt dans le vivier caché, le perroquet et les ânes sont de la partie et tous payent le prix fort d’une nuit inoubliable qui fait la Une des magazines People de l’époque : un engouement sans précédent.
C’est dans cette idée que le groupe Loulou (géré avec passion par Claire et Gilles Malafosse, frère et sœur d’une lignée de restaurateurs aveyronnais à Paris, à qui l’on doit Loulou Paris, Loulou Ramatuelle et Loulou Val d’Isère, des établissements à l’esprit maison et méditerranéen, inspirés de l’audace, de la fantaisie et du luxe discret de la muse d’Yves-Saint-Laurent : Loulou de la Falaise) a repris l’établissement. Accompagnés de l’entrepreneur-restaurateur monégasque Samy Sass (Sass Café et The Niwaki) – qui a bien connu les lieux dans son enfance… peut-être est-il le nouveau Pirate? – ensemble, ils ressuscitent ce Pirate longtemps endormi en lui redonnant une dynamique chic et festive d’aujourd’hui, entre élégance, décontraction, simplicité et joie de vivre, du déjeuner à tard dans la nuit.
Situé au 46 avenue Winston Churchill, Loulou Pirate se cache et se découvre derrière une porte en bois blanc, encadrée de deux mini-tourelles à l’allure royale. Après quelques marches en briques rouges, vous découvrez ce mythe qui s’ouvre à vous. Un imposant bar central, abrité d’un jeune pin parasol, est le point de circulation de cette vaste cour intérieure d’où la cuisine ouverte se fait spectacle.
La décoration, naturellement raffinée, se baigne de lumière tout en se cachant des jeux d’ombres bienveillants des toiles tendues le jour, elle se fait romantique et distinguée le soir à la lueur des bougies cadencée du son des vagues. Les terrasses, sur différents niveaux et juste au dessus des flots, permettent de vivre ce Pirate en toute quiétude d’une inoubliable vue pleine mer ou sur la belle ville de Menton. Chaque table est un spot idéal, les chaises, et les moelleuses et immaculées banquettes donnent envie de s’y lover avec une élégante nonchalance, un cocktail, une coupe de champagne ou simplement un verre perlant de fraîcheur d’un rosé cristallin à la main.
La carte, orchestrée par le chef exécutif maison Benoit Dargère (Alain Passard***, Le Laurent* Paris, Clos Saint-Basile Mougins, Le Flandrin Paris) est efficacement locale et simple, légère et sent bon les Rivieras (française et italienne), l’huile d’olive et les agrumes.
Les Tranches de thon rouge cru, à la belle mâche, s’assaisonnent de pertinence à l’italienne alla puttanesca, de tomates, d’ail, de câpres, d’olive et d’anchois. C’est addictif et vif à la fois.
Le Ceviche de bar à l’huile d’olive citron, straciatella, framboises fraîches, coriandre est fondant en bouche, la straciatella et les framboises fraîches sont la rondeur et l’acidulé en équilibre
La Burrata des Pouilles, pêches, sucrine, verveine et menthe fraîche a cette délicate et crémeuse gourmandise, adoucie de la croque en sucrosité des pêches en arôme herbacée de la verveine et de la menthe.
Les pizzas se savourent avec délice et presque sans façon, qu’elles soient à la Truffe ou aux
Fleurs de courgettes, stracciatella et pesto de roquette.
Les poissons de la pêche du jour et les légumes se grillent à la braise, se rôtissent, se cuisent en croûte de sel.
Le Piccata de veau al limone, sauge est celui du dimanche qui fait toujours plaisir, et le Poulpe à la braise, aïoli se plait de sa double texture croustillante et moelleuse à la fois.
Les pastas et rissoti sont de la partie et virevoltent entre luxe et simplicité : langouste, truffe, Vongole, thon et citron ou encore pesto de pistaches de Sicile.
Les desserts vibrent d’une parfaite Tarte au citron, zestes confits de citron vert et basilic ou d’une imposante et aérienne Pavlova de fruits rouges, meringue, sorbet, noisettes, pistaches caramélisées et chantilly. La Tarte est également Tropézienne ou Soufflée au chocolat.
La journée, l’ambiance est enjouée et bon enfant et peut se prolonger sur la plage et ses quelques transats. Le soir, elle est aussi bien romantique et chic que dynamique et familiale, avec un groupe de chanteurs en acoustique qui est en parfait écho du ressac de la mer si proche.
Les cocktails se shakent de bergamote, de purée de pêche, de verveine ou de fleurs d’orangers. La carte des vins est celle attendue dans ce type de lieu où l’étiquette est belle et connue.
Le service est brillant, vif et pro avec un vrai sens du détail, sous la houlette du directeur Guillaume Frizon de Lamotte.
L’accès se fait par la route avec son service de voiturier et par la mer avec le ponton d’accostage, en partenariat avec la Plage du Maybourne, située à quelques mètres, vous serez accompagné jusqu’à Loulou Pirate non pas à dos d’âne mais dans une superbe et très stylisée Fiat 500 Jolly Beach.
Pirate is Back et risque fort de redevenir très vite un incontournable de la région avec une identité d’aujourd’hui signée Loulou.
Entrées et Pizza 26 à 50€ – A Partager 58 à 79€ – Pasta 28 à 45€ – Plats 32 à 57€ – Desserts 17 à 68€
46 Avenue Winston Churchill
06190 Roquebrune-Cap-Martin
Tel : +33 (0)4 12 05 00 90
Le Petit Lu Gourmand Journaliste, Chroniqueur et Critique Gastronomique 