Le très dynamique et artistique Chef Jan Hendrik van der Westhuizen a ouvert sa nouvelle table niçoise, Le Bistrot de JAN, en novembre dernier et la présente comme : « A young version of me ; slightly rebellious, unafraid, always laughing, a touch daring — this is the essence that drives us » – » Une version plus jeune de moi-même ; légèrement rebelle, intrépide, toujours joyeuse, un brin audacieuse, telle est l’essence qui nous anime ».

Il a été l’un des précurseurs à faire vibrer la scène gastronomique dans le quartier du port de Nice en ouvrant JAN en 2013, avec un univers d’une cuisine créative, identitaire et métissée de ses origines sud-africaines et des saveurs de la Riviera, sa terre d’adoption. Distingué d’une étoile au Guide Michelin en 2016, il est ainsi devenu le premier chef étoilé sud-africain. Au parcours brillant et riche d’expériences de vies (lire l’article), c’est un entrepreneur et créatif dans l’âme qui ne s’arrête jamais. Il n’a cessé de développer de nombreux projets (éditions de magazines food et lifestyle, de livres de cuisine, production d’émissions culinaires, création d’une Culinary and Innovation Academy), tout ce qu’il touche est couronné de succès, de récompenses et de reconnaissances. Il a notamment été élu l’une des 100 personnes les plus influentes dans le secteur de la gastronomie en Afrique. En 2021, il ouvre un joyau au coeur de la sauvage et mythique Réserve Tsuwalu Kalahari, Klein JAN, un luxueux et authentique refuge intimiste et gastronomique, qui a très vite suscité l’intérêt des gastronomes, des critiques et des journalistes et fait partie de la prestigieuse liste, tout comme JAN Nice des « 50 best Discovery ».

C’est en février dernier, qu’il a officiellement inauguré sa nouvelle adresse à Nice, située juste à côté de son restaurant gastronomique et étoilé. Toujours entre ses deux mondes, la Riviera et son pays natal, Le Bistrot de JAN, entièrement pensé de l’imaginaire du chef, est un fabuleux mélange des genres, entre audace et douceur onirique, aussi bien dans les assiettes que dans le décor qui éclate de vie et de rythmes des années folles. Un bistrot délicieusement « à la française », racé à l’atmosphère fantasque cocteauesque et tamisée à la bougie qui virevolte entre un tableau de Toulouse Lautrec et une soirée mondaine et exaltante d’un Hollywood baroque des années 30… Josephine Baker n’est sûrement pas très loin. Tout est parfaitement conçu avec goût et espièglerie. Une fois poussée la porte, on entre dans un autre monde, bien loin du quotidien, celui du glamour, de l’insouciance et de la franche et élégante gourmandise. Le vert foncé aux murs et les dorures en discrétion ne sont pas sans rappeler les couleurs du drapeau des origines de Jan. La musique jaillit d’un électrophone des temps modernes entre charleston, jazz et chansons populaires qui fait swinguer la salle en douce harmonie. Quant à la vaisselle rétro et la belle argenterie, elles donnent le ton de ce ballet gourmand.





La carte, qui évolue constamment, joue aussi dans le mélange des genres d’une généreuse et élégante cuisine française et des vibrantes saveurs des souvenirs culinaires de l’enfance du chef avec les plats de sa tant aimée Ouma (grand-mère) : Maria.
Les cocktails y sont subtils, raffinés et shakés avec style, comme le Southini (Gin Clement Gold, Noilly Prat Dry, Olives n’Twist) ou encore le cocktail du jour : l’Agrumini (Gin, yuzu, combava, citron et sirop de jasmin). Ils se savourent avec allure au chaleureux bar de l’entrée ou directement à table.


Pour commencer, on plonge avec délice, passion et réconfort dans la Soupe de poulet au citron vert, avocat pomme, champignon et bergamote qui a cette identité curry et chaude d’une tom kha kaï. L’avocat et le claquant maïs font, avec la soupe, un savant et vibrant chaud-froid qui étonne et attise les papilles avec justesse. La bergamote vient kicker l’ensemble. Le poulet en morceaux reste moelleux et garde sa gourmande verve rehaussée de la profondeur terrienne des champignons.

Les Légumes oubliés, comté, amasi et sauge : on croque de vie dans ces légumes oubliés (topinambours, crosnes et salsifis), le lait fermenté traditionnel sud-africain amasi vient velourer l’ensemble de son charme lacté et le comté engourmandise de son identité noisettée. La sauge, brûlée à la flamme juste avant de servir, tout comme les légumes et le comté, embaume de son ésotérique parfum. Une assiette qui fait plaisir par son côté régressif-moderne.

De la Mer Méditerranée, poisson du jour, orange sanguine, piment rouge et pamplemousse, la sériole, d’une grande fraîcheur à cru de ses belles tranches, rougit de l’amertume de la sanguine orange, du pamplemousse et de la tonalité du piment qui vient équilibrer de sa suave personnalité.

Daddy’s Beef tartare, beurre noisette et topinambours : ici le boeuf, ne se fait pas tartare classiquement condimenté, il se donne de sa texture et s’intimide quelque peu des chips de topinambours à la croustillante douceur. Le beurre noisette, monté au jaune d’oeuf, enrobe avec bonheur le palais, ce qui fait de cette entrée un élément majeur et séduisant.

Au Bistrot de JAN, les plats, tel un festin, célèbrent aussi bien la famille et les recettes de partage de Mémé, comme l’inoubliable et moelleuse Tourte au poulet sauce truffée, le Couscous Royal ou encore le Bar entier sauce Chakalaka, que la traditionnelle gastronomie française, aux saveurs presque révolues, et qui revient enfin en force avec passion, comme l’inégalable Tournedos Rossini.

La Tourte au poulet sauce truffée est, déjà au visuel, d’une gourmandise absolue, en forme éclatante d’un soleil, de son luisant feuilletage qui donne cette irrépressible envie de découvrir son antre, son secret gardé et d’entendre son chant feuilletant à la découpe. Tous les sens sont en fébrile effervescence de découvrir cette rayonnante tourte. La première bouchée est un accomplissement absolu de tout, entre moelleux, crémeux, telle une indéniable blanquette de veau, ici au poulet, où tout est là pour le plaisir des sens. Chaque bouchée touche l’extase absolue renforcée de la sauce en émulsion de truffe : le nirvana gustatif n’est pas loin.

Le Tournedos Rossini : tout est pratiquement dit dans cet emblématique intitulé de la grande gastronomie française signée Escoffier. Un filet de boeuf cuit à la perfection, une tranche de foie gras cru poêlée et une sauce en concentré de truffe. Générosité absolue de cette assiette profonde et ancrée dans la tradition. Un mariage parfait du filet, du foie et de la truffe en lamelles, tout en bénédiction de la sauce qui, ici, a cette concentration un peu poussée et un brin « sticky » qui peut dérouter. La classique association fonctionne efficacement, telle une viandarde madeleine de Proust.

Le poisson du jour cuit à l’unilatéral, sauce rooibos, le lieu jaune, cuit d’une montante chaleur, se gargarise de délices de sa sauce crémée à la délicatesse de l’emblématique « buisson rouge ». Le croquant fenouil, lui aussi en buisson, d’une pointe vinaigrée anisée, apporte la cadence nécessaire et bien vue.

Côte de Porc fermier BBQ, sauce de prunes et miel : un aigre-doux réussi de cette côte de cochon, à la cuisson un tantinet poussée, mais en savoureuse textures de pignons de pin, d’oignons rouges et de petits coutons. Ça croque, ça croustille et ça moelle, et le tout est bon et bien balancé.

Pour les accompagnements, on cadence la fourchette entre la Salade croquante, lard, croûtons et pignons, telle une wedge d’un steakhouse qui ravive les papilles de sa salutaire pointe vinaigrée, la Purée de pomme de terre et haricots verts est un mélange réussi des goûts et des couleurs entre le tubercule et la verte gousse, quant au Bobotie de lentilles, il est ici en version végétarienne de la tradition sud-africaine se préparant habituellement à base d’agneaux; il est un gratin de lentilles savoureux et totalement addictif qui ne laisse pas indifférent, la cuillère a cette fâcheuse mais savoureuse manie, presque incontrôlée, d’y retourner avec passion.


En dessert, on est envoûté du Malva, de maman, glace vanille : un pudding réconfortant de chaleur tel les bras d’une maman aimante. L’Île flottante aux amandes et noisettes est un pari réussi de la tradition bistrotière ravivée des zestes d’agrumes.


La carte des vins est bien pensée, intelligente, aux tarifs ajustés et aux étiquettes qui virevoltent entre l’excellence de l’Afrique du Sud et de belles découvertes atypiques et confidentielles françaises, avec un passage par l’Italie.


Elliott Kin, le pertinent directeur, mène un service professionnel d’une finesse et sincère précision.
Le Bistrot de JAN est un coup de coeur gourmand à la fois chic, démocratique et unique.
Carte – Entrées 9 à 19€ – Plats 19 à 58€ – Desserts 8 à 12€
Menu du jour au déjeuner – Entrée-Plat ou Plat-Dessert 27€ ou Entrée-Plat-Dessert 32€
Ouvert du mardi au samedi 12h-14h30 et 18h-22h30 – Dimanche 11h-15h

Le Bistrot de JAN
12, rue Lascaris
06300 Nice
Tel. 04 93 26 81 52


