
La ville de Nice s’est enrichie en 2011 d’une belle adresse gastronomique située non loin de la place Massena et des abords de la coulée verte, devenue incontournable des gourmets niçois. Le chef japonais Tsumoru Takano a fait ses armes au feu Stella Marris à Paris du chef Taturo Yoshino ( un des précurseurs de la mouvance nippone en France ), puis auprès des frères Pourcel au Jardin des Sens à Montpellier. C’est Keisuke Matsushisa, chef japonais au coeur niçois, qui lui donnera toute sa confiance afin de lui permettre de s’exprimer et de s’épanouir dans son identité : une cuisine française, méditerranéenne, à la parfaite technique et rigueur nippone. Très sérieusement épaulé en salle par le dynamique Geoffroy Crespo ( d’une célèbre famille de restaurateurs niçois ), le chef, à la discrétion toute japonaise et aux gestes maîtrisés, n’hésite pas à donner un coup de main en salle pour fluidifier ou maintenir le service en rythme. Il est toujours agréable et sympathique de voir le chef apporter ses créations avec un sourire en respect et timidité toute japonaise.
La salle quasi confidentielle de l’extérieur est d’une intimité épurée et contemporaine, soulignée de touches de couleurs par le velours carmin des fauteuils et des coussins. Les tableaux et sculptures apportent une chaleur certaine.

Les plats changent très souvent au gré des saisons et des inspirations; le menu- dégustation, quant à lui, permet de découvrir toute l’amplitude des saveurs du chef.
Pour commencer, en amuse-bouche : Oignons rouge des Cévennes caramélisés au chorizo, Bavaroise de poivrons farcie au chorizo : l’oignon doux, fondant, est vite rappelé à l’ordre de sa torpeur sucrée par le chorizo. Une association bien menée tout comme le bavarois entre texture velours réconfortante et saveurs péchues. L’ensemble est très gourmand, et provoque une inéluctable envie de plus. Une bouchée qui « titille ». Une parfaite entrée en matière qui met en éveil.

Carpaccio de loup et de pélamide, salade de fenouil au citron aubergines marinées au Dashi : le loup travaillé en carpaccio est d’un fondant irréel et la pélamide tranchée en sashimi donne un côté plus texturé et « viande » à l’assiette, les chips d’ail sont le relief terrien et le fenouil cru au goût vivant et anisé redonne une fraîcheur vive et agréable, l’ aubergine confite marinée, ramène dans un gourmand fondant et subtilement iodé par le dashi, la courgette trompette en tempura est la « croustille »qui fait plaisir. Il y a du fondant, du croquant, du iodé, de la mache… : une maîtrise et un parfait équilibre de la courbe des saveurs.

Ravioli de langoustines et foie gras, bisque de crustacés : Une fine et délicate pâte de raviole tel un voile qui dissimule en harmonie et en transparence une langoustine savoureuse d’une belle fraîcheur, le bouillon joue parfaitement son rôle de gourmandise iodée et raffinée. Le tempura de langoustine en accompagnement est exhausteur de texture nippone et donne toute la personnalité à la langoustine.

Foie gras poêlé, figues rôties, polenta crémeuse : saveurs terroir, agréable association de la polenta et de la figue, le foie est légèrement en dessous par sa texture granuleuse et un peu trop grasse, mais cela reste une entrée gourmande.

Carré d’agneau rôti : un intitulé aussi simple que déconcertant d’efficacité, une sublime cuisson et une pureté du produit nue, l’agneau simplement enveloppé d’une délicate infusion d’herbes s’exprime dans toute sa splendeur, les légumes sont d’une grande saveur bavarde en bouche, épaulés par un jus de cuisson légèrement pimenté.

Daurade jus de coquillage : la daurade est mise en valeur par une cuisson, une fois de plus maîtrisée, qui sublime son goût et sa texture. Le concentré complexe des saveurs du jus iodé est percutant, mixant ingénieusement panache à la française, délicatesse et précision japonaise. En accompagnement, la pomme de terre soufflée est légère et goûteuse.

Le bœuf wagyu : finesse et élégance d’un pur produit bien mené qui s’exprime de façon racée et gourmande.

Même s’ils sont très bons, on pourrait regretter l’uniformité des accompagnements pour tous les plats et un dessert unique… ce qui est vite oublié quand on sait que le chef est seul en cuisine pour mener une cuisine savoureuse et pleine d’humilité.
En dessert, le pain perdu aux fruits rouges, glace au Caramel beurre salé est vif, gourmand et croustillant.

La carte des vins propose de jolies surprises pointues et bien choisies, parfaitement mise en valeur par Geoffroy qui saura vous amener vers de belles découvertes.
Un grand coup de cœur pour Les Deux Canailles. Un très beau travail des produits, tout en finesse et précision, les plats, aux intitulés parfois simples, recèlent de surprises raffinées qui apportent un « fizz » et donnent toute l’identité pour un réel plaisir gourmand. Une cuisine où le chef vous emmène dans son univers d’une justesse vraie.
Menu déjeuner : entrée – plat ou plat – dessert 23€
Menu déjeuner : entrée – plat – dessert 29€
Menu Canailles : entrée – plat – fromage ou dessert 49€
Menu dégustation en 5 services 68€
Carte – Entrée 16 à 21€ – Plats 25 à 45€ – Dessert 15€
Les Deux Canailles – 6 rue Chauvin – 06000 Nice
09 53 83 91 99